M.Guez déclare lui que si cet article 7.3 n'est pas supprimé, certains fournisseurs de mesures techniques pourraient quitter la France. Il ajoute que l'intervention du législateur français qui vise à faciliter le développement de systèmes numériques de gestion de droits interopérables, en plus d'être nuisible au marché, est incompatible avec les engagements communautaires et internationaux de la France. Il reprend là un discours bien connu et juridiquement infondé : celui des représentants de Microsoft, d'Apple et de la BSA.

L'initiative EUCD.INFO, qui a contribué à l'introduction de cet article, relève tout d'abord qu'il est assez étonnant qu'un représentant de producteurs de disques, corporation qui réclame en permanence l'intervention de l'Etat, qui s'appuie sur un monopole organisé par la loi pour échapper en partie aux lois du marché, et qui ne cesse de se plaindre de l'absence d'interopérabilité des mesures techniques, reprenne à son compte de tels propos.

Si l'intervention du législateur permet aux services “légaux” de devenir un peu plus concurrentiels en terme de valeur d'usage face aux réseaux publics d'échange (Kaaza, bittorent, edonkey, ...), et fait parallèlement cesser les pratiques anti-concurrentielles constatées sur le marché des mesures techniques et les marchés dépendants (musique en ligne, lecteurs multimédia, baladeurs numériques...), on voit mal en quoi cela pourrait nuire aux interêts des producteurs de disques ... sauf si bien sûr les membres de la SCPP se sont déjà entendus avec certains fournisseurs de mesures techniques en vue de de maintenir la rareté de l'offre et des prix excessifs sur leurs marchés respectifs.

L'initiative EUCD.INFO constate de plus que M.Guez oublie deux éléments d'importance dans son raisonnement :

1°) les prises de position répétées de la commission des finances, de l'économie générale et du plan qui a signalé qu'une absence d'intervention du politique sur certains marchés du secteur des TICS, et notamment sur le marché des mesures techniques, pourrait porter atteinte à la compétitivité de la France dans la société de l'information et à la sécurité économique nationale. (3)

2°) le fait que si le législateur français se doit d'intervenir, c'est bien parce que le législateur européen l'a fait avant lui de façon maladroite et, ce faisant, a déstabilisé la libre concurrence sur le marché du logiciel. Résultat : des étudiants de l'Ecole Centrale de Paris, auteurs d'un lecteur multimédia interopérable obtenu via ingénierie inverse (activité jusqu'à présent parfaitement légale) menacés par Apple sur la base de la directive transposée par le projet de loi DADVSI, et la FNAC, tétanisée, incapable de concurrencer réellement cette même société sur le marché de la musique en ligne et ce bien qu'Apple pratique la rétention d'informations essentielles à l'interopérabilité, activité anti-concurrentielle au possible quand l'ingénierie inverse n'est plus autorisée. Il n'y a donc bien qu'intervention corrective et non déstabilisatrice.

Dès lors, l'initiative EUCD.INFO estime que, en s'érigeant comme il le fait en “thuriféraire de la main invisible d'Adam Smith” (4) pour le seul bénéfice de sociétés extra-européennes violant le droit de la concurrence depuis des années (sans que la commission n'intervienne réellement pour faire cesser le trouble (5)), M.Guez rame clairement à contre-courant.

Qui plus est, sa proposition va à l'encontre des interêts des acteurs de l'industrie du logiciel libre, industrie identifiée par la commission des finances, de l'économie générale et du plan comme permettant à l'Europe de reprendre l'initiative sur le marché du logiciel, marché stratégique si il en est.(6)

Bien qu'il soit peu envisageable qu'un responsable politique relaie des propos à ce point contraire aux interêts de la Françe et des français, les membres fondateurs de l'initiative EUCD.INFO ont écrit aux rapporteurs parlementaires concernés, aux présidents des groupes parlementaires et au nouveau ministre délégué à l'industrie pour leur demander de s'opposer personnellement à tout parlementaire ou ministre qui présenterait une proposition calquée sur celle de la SCPP. Estimant par ailleurs que plusieurs dispositions du projet de loi DADVSI doivent être modifiées, et notamment l'article 7.3, ils leur ont également communiqué plusieurs amendements.

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