En plus des demandes formulées ci-dessous, l'initiative EUCD.INFO soutient les demandes des associations de bibliothécaires, de documentalistes et d'archivistes. Plus de détails


Sur les méthodes actuelles du gouvernement français et de la Commission européenne :

NOUS DEMANDONS LE RETRAIT IMMÉDIAT DU PROJET DE LOI DADVSI DE L'ORDRE DU JOUR PARLEMENTAIRE. Il est fondamentalement inacceptable que le gouvernement français ait déclaré l'urgence sur un projet de loi qui a pour objectif de faire ratifier à la France deux traités internationaux négociés il y a dix ans sans mandat par la direction générale du Commerce de la Commission européenne, et dont les négociateurs français de l'époque disent aujourd'hui : "on n'a rien vu venir". Par ailleurs, on ne modifie pas un droit bicentenaire et fondamental pour l'adapter à l'ère du numérique comme on pond un décret et qui plus est à la veille de Noël. La dernière grande loi sur le droit d'auteur - la loi de 1957 qui a notamment défini clairement que l'exception de copie privée échappe au monopole de l'auteur et que l'usage privé n'est pas contractualisable comme l'ont récemment rappelé deux cours d'appel - a mis plus de 50 ans pour être votée. Et on voudrait aujourd'hui sanctuariser les dispositifs de contrôle d'usage privé, supprimer la copie privée pour les services à la demande et la transformer en copie de sauvegarde pour les CD et DVD, tout cela en un mois et demi ?

NOUS DEMANDONS À LA COMMISSION EUROPÉENNE DE CESSER SES PRESSIONS. L'Europe démocratique ne se construira pas sous la menace et au mépris du droit des peuples à obtenir un débat parlementaire national digne de ce nom. Menacer la France de sanctions financières pour qu'elle transpose au plus vite un texte aussi polémique que l'EUCD témoigne d'une conception très particulière du débat parlementaire et du rôle des élus nationaux. Surtout dans le but que l'Union européenne puisse ratifier les deux traités internationaux mentionnés ci-dessus. À croire que la Commission souhaite creuser inutilement le déficit de la France et le fossé entre le peuple français et les institutions européennes. De plus, la Commission semble bien mal placée pour venir reprocher à la France de n'avoir pas transposé l'EUCD dans les temps. Le jour où elle respectera l'article 12 de cette directive et remettra le rapport attendu par le Parlement européen et le Conseil économique et social, elle sera un peu plus crédible dans son rôle de cerbère du droit communautaire. Par ailleurs, on attend toujours qu'elle résolve le problème de double paiement pour le consommateur induit par l'impossible application de l'article 5.2b, et qu'elle trouve une solution pour, à la fois, conserver la protection juridique des mesures techniques, prendre en compte les droits des auteurs de logiciels libres et résoudre le conflit qui existe entre l'EUCD et la directive 91/250CE.

A propos des menaces de la Commission et de leur légitimité voir : Droit d'auteur vers une Europe du pire emmenée par la France, Complément sur Linuxfr


Sur le contenu du projet de loi DADVSI, nous demandons :

Le droit de lire : la suppression de l'amendement 30

  • Le 31 mai 2005, la Commission des Lois a adopté un amendement radical proposé par le député Vanneste. Il doit permettre aux titulaires de droit d'utiliser des mesures techniques pour interdire la copie privée aux membres du public n'ayant pas acquis une licence d'utilisation. Comme, techniquement, pour contrôler la copie, il faut forcément contrôler l'accès (donc la lecture), de facto une telle autorisation ferait du droit de lire un droit exclusif. Chaque lecture pourrait être facturée. Cela diviserait la France entre les ayant-accès à la culture numérisée, et les autres.

L'exclusion des protocoles, des formats et des méthodes de brouillage, de cryptage, et de transformation de la définition de mesure technique

  • Si une personne physique ou morale pouvait se prévaloir du régime de protection des mesures techniques sur un format, un protocole, ou une méthode de cryptage, de brouillage ou de transformation – pris en tant que tel – elle exercerait un contrôle sur l’ensemble des programmes informatiques les mettant en œuvre. Une telle protection serait encore plus perverse que la protection par le brevet des méthodes susceptibles d'implémentation logicielle dans la mesure où la protection juridique des mesures techniques repose sur le secret. Des démonstrations mathématiques de chercheurs en cryptographie ou en stéganographie pourraient être interdites de communication au public car utilisées par les fournisseurs de mesures techniques.

Le droit de ne pas être systématiquement considéré comme un délinquant quand on contourne une mesure technique ou que l'on divulgue une information qui pourrait faciliter le contournement

  • Actuellement le projet de loi assimile le contournement de mesures techniques à une contrefaçon. L'assimilation du contournement à une contrefaçon introduit une présomption de culpabilité en matière de contournement. Cette assimilation n'était pas une obligation fixée par la directive. Comme aucune limite n'est posée à la protection juridique des mesures techniques, cela revient à créer, comme l'a si bien dit le rapporteur de l'Assemblée nationale, une présomption d'utilisation déloyale, à introduire du présumé coupable dans le droit français. De plus, le droit français protège déjà de façon adéquate les mesures techniques via les dispositions relatives à la fraude informatique, au parasitisme et à la concurrence déloyale. Seules quelques modifications mineures sont nécessaires.
  • Le projet loi protège de façon abusive les mesures techniques. Il est nécessaire que l'expression utilisée dans l'article L335-3-1 et proposée à l'article 13 du projet de loi soit reformulée pour que soit clairement indiqué que seuls les outils principalement conçus et n'ayant qu'une utilisation limitée autre que le contournement sont prohibés. Une telle reformulation est nécessaire pour éviter la création d'une insécurité juridique sur le marché des TICS qui pourrait entraîner un gel de l'innovation ("chilling effect") . Elle déséquilibrerait la libre concurrence en empêchant la mise sur le marché de logiciels ayant une utilisation principale autre que le contournement (par exemple, la lecture d'un DVD sur un système d'exploitation boycotté par le fournisseur de la mesure technique).
  • Il faut par ailleurs supprimer l'expression "faire connaître directement ou indirectement" dans ce même article. Cette expression est une menace évidente pour la liberté d'expression, notamment des journalistes, des chercheurs en sécurité informatique et des auteurs de logiciels libres.

Nous demandons également :

  • La mise en place d'exceptions à l'interdiction de contournement des mesures techniques (usage licite, sécurité informatique, vie privée, interopérabilité).
  • La mise en place d'une obligation pour les fournisseurs de mesures techniques de fournir les informations essentielles à l'interopérabilité dans des conditions réellement équitables et non discriminatoires. C'est à dire prenant notamment en compte les droits des auteurs de logiciels libres.

Le droit de ne pas être systématiquement considéré comme un délinquant quand on supprime une information électronique protégée, ainsi que la suppression des dispositions non requises par la directive

  • Il faut supprimer l'alinéa 1 de l'article L335-3.2 proposé à l'article 13 du projet de loi pour que la suppression d'une information électronique protégée ne soit plus en tant que telle assimilée à un délit de contrefaçon.
  • Il faut supprimer les alinéa 3, 4 et 5 de ce même article qui prohibent la fabrication, l'importation et la détention d'outils facilitant la suppression d'une information électronique ainsi que la fourniture d'une information (sic) facilitant une telle suppression. Une telle prohibition n'est pas requise par la directive. Cela revient à dire que toute personne indiquant où se trouve, dans un fichier, telle ou telle information protégée, ou fournissant un outil ou une méthode permettant une telle localisation est un délinquant. Cette disposition servira à l'évidence, tout comme cela a été le cas aux États-Unis, à censurer tout chercheur en sécurité informatique qui souhaiterait dévoiler une faille dans un système de watermarking utilisé par l'industrie du disque ou du film. C'est une menace pour la liberté d'expression.

La suppression du médiateur pour la copie privée pour éviter la création d'un tribunal d'exception

  • Il faut supprimer l'article 9 du projet de loi instaurant un "collège de médiateurs". Il n'y aucune raison valable de créer une juridiction d'exception pour interpréter trois alinéas du Code de propriété intellectuelle. Une fois que la loi sera claire et non-ambiguë quant à ses effets, elle pourra être interprétée par les juridictions habituelles. Par ailleurs, depuis quand la justice de première instance ne se rend qu'à Paris dans la République française ?