La Commission Européenne a annoncé hier avoir demandé à la France ''"de se mettre immédiatement en conformité avec un arrêt antérieur de la Cour de justice européenne relatif à la non-transposition de la directive de 2001 sur le droit d’auteur."''[1]

La Commission précise dans son communiqué que ''"la directive oblige les États membres à assurer une protection juridique adéquate contre le «piratage» ou la neutralisation des dispositifs «anti-copie»."''

La Commission conclut que comme la directive transpose deux traités internationaux datant de 1996, sa transposition en droit national n’en est que plus urgente.

Suite au tollé qu'a soulevé en France la première tentative de passage en urgence du projet de loi DADVSI transposant cette directive de 2001 [2] l'initiative EUCD.INFO trouve le comportement de la Commission particulièrement déplacé.

Le droit d'auteur français est un droit bicentenaire et fondamental auquel les Français sont attachés. On ne peut le modifier dans l'urgence sans consensus, et sûrement pas sous la menace et au nom d'une directive "Marché intérieur", exception culturelle oblige.

De plus, faire pression comme le fait la Commission témoigne d'une conception de la démocratie et du rôle des parlements nationaux particulière. Surtout au regard de la mobilisation exceptionnelle qu'a suscité le débat parlementaire sur le projet de loi DADVSI, et des enjeux évoqués à cette occasion. Il faut que la représentation nationale française puisse prendre le temps de rechercher l'interêt général et de délibérer en conscience. Sans influence.

Qui plus est, avant de jouer au cerbère du droit communautaire, la Commission pourrait au moins proposer des solutions aux problèmes majeurs que posent la directive concernée et qu'elle a identifiés (inapplicabilité de l'article 5.2b en pratique, conflit avec la directive 91/250CE, absence de prise en compte des droits des auteurs et des utilisateurs de logiciels libres). [3]

Nul doute que le ministère de la Culture et les parlementaires français lui en seraient sûrement gré vu qu'ils y sont eux aussi confrontés.

La moindre des choses aurait aussi été pour la Commission de se mettre en conformité avec l'article 12 de la directive qu'elle demande à la France de transposer "immédiatement". Le Conseil, le Parlement européen, le Conseil Économique et Social attendent en effet toujours le rapport qu'elle aurait dû remetttre au plus tard le 22 décembre 2004.[4]

Enfin l'initiative EUCD.INFO a noté que la Commission Européenne parle de dispositifs "anti-copie" alors que le président de la République Française a rappelé lors de ses voeux aux forces vives de la Nation qu'il souhaitait que le droit essentiel à la copie privée soit garanti. [5]

Ceci confirme ce qui se dit dans certains ministères : la Commission envisage de résoudre à l'avenir le problème de l'articulation des mesures techniques et de la copie privée en autorisant l'interdiction pure et simple de cette dernière. Comme la France résiste, les menaces tombent.

L'initiative EUCD.INFO demande dès lors à ses soutiens d'écrire à la Commission Européenne pour lui demander de cesser ses pressions et pour lui rappeler que le droit de chaque Français à la copie privée n'est pas négociable. [6]

I - Références

[1] Communiqué de la Commission européenne demandant une transposition immédiate

[2] Revue de presse sur le DADVSI

[3] Le chef de l'unité Droit d'auteur expliquant les problèmes que pose la directive

[4] À propos de l'article 12

[5] Le discours du Président de la République aux forces vives de la Nation

[6] L'adresse de la direction générale Marché Intérieur

II - À propos de l'initiative EUCD.INFO

EUCD.info est une initiative créée par la FSF France (chapitre français de la Free Software Foundation) dont la mission est d'informer sur les conséquences sociales et économiques de la directive européenne du 22 mai 2001 relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information (surnommée EUCD), et de contribuer à l'évolution de l'acquis communautaire relatif au droit d'auteur.