Interpellation publique d'un membre de la CNIL
la CNIL a t-elle ou va t-elle autoriser des acteurs privés à mettre en oeuvre des traitements automatisés ayant pour objectif de détecter des comportements délictuels présumés ou - poser autrement - la CNIL va t-elle autoriser des sociétés comme la SACEM et la SCPP à mener des enquêtes pénales pro-active en lieu et place des services de police agissant sous le contrôle d'un juge ? Et si oui - ou même si non - la décision de la CNIL a t-elle été ou sera t-elle influencée par le récent rapport du groupe article 29 - la CNIL des CNIL - qui indique clairement que ce type d'activités est réservée aux autorités judiciaires ?
J'ai assisté hier à une conférence intitulée "Prévention de la criminalité et protection des libertés sur l'internet" et organisée par l'ADMI. http://www.cejem.com/breve.php3?id_breve=27 Bien que tous les intervenants semblaient intéressants (et ils l'ont été, certains plus que d'autres toutefois), j'y suis personnellement allé car cela fait un petit moment que je voulais interpeller un représentant de la CNIL (vu qu'aucun journal ne le fait) sur cette question de la recherche automatisée sur Internet d'infractions présumées au droit d'auteur par des organismes de défense de titulaires de droit d'auteur et de droits voisins. J'ai donc patiemment attendu la séance des questions puis j'ai demandé au représentant de la CNIL , la chose suivante, après avoir bien réintroduit le contexte (mon intervention était, je l'avoue, un peu préparée ;) : Vous aviez deux mois pour répondre aux demandes qui vous ont été faites (et je crois savoir qu'il y en a). Ma question est donc la suivante : la CNIL a t-elle ou va t-elle autoriser des acteurs privés à mettre en oeuvre des traitements automatisés ayant pour objectif de détecter des comportements délictuels présumés ou - poser autrement - la CNIL va t-elle autoriser des sociétés comme la SACEM et la SCPP à mener des enquêtes pénales pro-active en lieu et place des services de police agissant sous le contrôle d'un juge ? Et si oui - ou même si non - la décision de la CNIL a t-elle été ou sera t-elle influencée par le récent rapport du groupe article 29 - la CNIL des CNIL - qui indique clairement que ce type d'activités est réservée aux autorités judiciaires ? Grosso modo, la réponse à la première partie a été "sûrement mais en fait, je ne suis pas chargé de ce dossier, je sais simplement qu'il devait être traité hier, mais que cela a été reporté peut-être à demain ou à la plénière de la semaine prochaine mais ne vous inquiétez pas nous communiquerons là dessus car nous savons que c'est sensible". Il a ajouté qu'il trouvait regrettable, "en tant que citoyen", que cette dérogation ait été traité dans une "loi de portée générale" et un truc style "la loi, c'est la loi et nous on est la CNIL, on fait pas la loi, on l'applique". Comme j'attendais la réponse à la deuxième question (justification par rapport à la position du G29) qui n'arrivait pas, et comme la réponse à la première partie m'avait, comment dire, agacé ?, j'ai pas pu m'empêcher de lui demander si il trouvait normal que une autorité dite "indépendante" voit la loi qu'elle est censé appliquer modifiée par des élus qui sont aussi membres de cette autorité dite "indépendante", et si en fait il défendait pas cette modification car elle avait été proposé par de tels élus dont notamment le président de la CNIL, M. Alex Turk. Jusqu'au boutiste, j'ai ajouté " et qui a vu un autre de ses amendements du même genre censuré par le conseil constitutionnel". Là le flou est devenu encore plus palpable => "effectivement, c'est un choix français le fait qu'il y ait des élus membres de la CNIL","mais vous savez, il y a plus de quinze commissaires", " c'est collégial", "je connais pas le dossier, je vous dit", et patati et patata .... Au final, comme je suis pas du genre à lâcher l'affaire quand on me répond pas, à la fin de la conf, je suis allé le voir et lui ai(re)demandé, vu qu'il avait l'air de dire que la CNIL va se parjurer, comment ils allaient se justifier face au rapport au G29. J'ai eu le droit à tout sauf à une réponse. Par conséquent, je lui ai fait clairement comprendre que si la CNIL autorisait ce type de traitement, avec quelques amis, on s'occuperait de la pub de la CNIL et pour un petit moment, et qu'il faudrait vraiment qu'ils évitent de dire que c'est pas eux qui font la loi et qu'ils sont obligé de confondre, à cause de l'amendement d'un de leur commissaire, "infraction présumée" et "condamnation suite à une décision de justice", recherche pénale pro-active et casier judiciaire privé, car c'est tout sauf vrai. A noter enfin, la question (naive ?) de la représentante de l'AFA : "mais si seul le juge donne le droit de communiquer les noms correspondants aux IP, je vois pas ce qui vous dérange". Réponse (en substance) : "la police fait la police sous le contrôle d'un juge dans le cadre prévu par la loi, c'est ce qu'on appelle l'État de droit. Si vous voyez pas de quoi je parle, allez vivre en chine ou en birmanie".